répartition des écoles d'architecture en france |
Au cours des grandes périodes de l’enseignement de
l’architecture, la notion de Pluridisciplinarité a fortement évolué mettant en
avant une ou plusieurs dimensions de l’architecture. Durant la période de
l’Académie (1671-1863) la pluridisciplinarité était quasi absente. L’architecture
s’enseignait de manière globale. Ce n’est qu’au cours de la période Beaux-arts
(183-1968) qu’elle apparaît. L’enseignement s’ouvre aux techniciens multipliant
les disciplines scientifiques (mathématiques, construction et applications sur
les chantiers…).
Mais la période charnière de cette Multidisciplinarité est celle des unités d’enseignement (1968-2005). L’éclatement
des Beaux Arts en 21 écoles appelées unités pédagogiques va permettre à chaque
établissement de se spécialiser à l’aide des matières de son choix. Ainsi de
nouvelles disciplines se mettent en place pour pallier au rejet de la théorie. C’est
l’apparition de l’urbanisme, l’intégration des sciences humaines et le
développement de l’histoire. L’architecture longtemps considérée pour un aspect
seulement esthétique, va prendre une dimension éthique et scientifique. Cependant
cette parcellisation du cadre théorique va entrainer un assèchement du projet
d’architecture, souvent au profit du projet urbain.
Depuis la création des unités pédagogiques, les écoles
affichent clairement leurs spécialisations. Par exemple Paris-Belleville ou
Marseille tendent vers la recherche,
Clermont-Ferrand et Grenoble vers la technique Bordeaux vers le paysage et
l’urbanisme… Ce panel permet déjà à l’étudiant de choisir une orientation selon
l’école vers laquelle il se dirige. Depuis
2005, le système LiMaDo a adapté le modèle universitaire aux écoles
d’architecture. On ne parle plus de pluridisciplinarité mais
d’Interdisciplinarité. On observe une diminution du taux horaire des
disciplines enseignées pour un retour au projet. Les différents enseignements participent
donc directement à l’atelier de projet. Ainsi des enseignants urbanistes,
ingénieurs, paysagistes et même sociologues se voient intégrés à l’atelier de
projet apportant des visions nouvelles.
L’enseignement de type universitaire tente également
d’amener de nouvelles disciplines et de lier des interdisciplinarités telles
que l’architecture et l’ingénierie, l’architecture et le paysage… Ces
nombreuses ouvertures sont de nouveaux moyens d’aborder le projet, de nouveaux
angles d’attaque pour la mise en place des concepts. Ainsi, avec ses regards
différents, les étudiants créent leur propre manière de concevoir
l’architecture en fonction de leurs préoccupations personnelles. De nombreux
enseignants disent aux étudiants de se « lâcher » lors des projets
d’écoles car ils n’en auront pas tous l’occasion au cours de la pratique
professionnelle. Je pense que la pluridisciplinarité et l’interdisciplinarité
sont des moyens de se construire, de Réinventer pour chacun le métier
d’architecte pour leur permettre de s’individualiser et donc de s’épanouir dans
la pratique professionnelle. Néanmoins, l’enseignement dispensé dans les écoles
doit rester une formation d’architecture. Les étudiants doivent acquérir des
bases théoriques et méthodologiques propres à la conception du projet. Aussi,
peut-on se demander si la pluridisciplinarité « à la carte » comme
elle existe dans certaines ENSA doit être mise en place dès la première année ?
De plus, malgré la présence dans chaque école
d’ateliers, de studio ou de domaines aux préoccupations disciplinaires
divergentes, les spécialisations au sein de la pratique professionnelle restent
floues. Les élèves sont peu informés des formations post-diplôme. Après cinq
ans d’études et des spécialisations dans différents domaines beaucoup désirent
un travail différent de celui de l’agence. Il semble important que la
régulation avec le système universitaire permette d’afficher clairement les
passerelles possibles avec un diplôme d’architecte. Les écoles, également très
marquées par leurs particularités disciplinaires ne communiquent qu’en petits
groupes souvent dus à la proximité géographique. La Clarification des
potentiels de chaque école permettrait une vraie liberté de choix pour les
étudiants.
Un débat permanent anime les enseignants chercheurs
et les enseignants praticiens. Les premiers souhaitent ouvrir les écoles
d’architecture au plus grand nombre et donner plus de place aux disciplines
universitaires. Les seconds envisagent au contraire une réduction des effectifs
pour favoriser l’enseignement du projet. Mais ne peut-on pas, laisser les
étudiants Choisir leur propre chemin disciplinaire? Depuis les années 60, le
nombre d’étudiants n’a cessé d’augmenter. Alors qu’avec la reconstruction et
l’ouverture du marché des logements sociaux aux architectes les jeunes diplômés
trouvaient facilement un emploi; aujourd’hui
le marché du travail est saturé. Face aux universités, les écoles
d’architecture ont un taux de réussite plus important et un taux d’abandon plus
faible. Malgré une ouverture disciplinaire affirmée, l’entrée dans le système
universitaire doit savoir conserver les atouts d’une formation professionnelle
Marine Tixier
Doctorante en architecture à l'ENSAP Bordeaux
Laboratoire PAVE
Laboratoire PAVE